Vous connaissez probablement Wikipedia, le célèbre projet d’encyclopédie sur Internet, dont le contenu est librement accessible et réutilisable par tous, et rédigé par les internautes. Wikipedia est disponible dans plus de 200 langues. Vous connaissez peut-être moins Wikimedia Commons, le répertoire d’images, vidéos et sons associé à Wikipedia. Commons est un site multilingue qui héberge la plupart du contenu multimedia ensuite utilisé et affiché sur Wikipedia. Comme pour Wikipedia, les photographies, schémas, cartes, vidéos et sons qui constituent le contenu de Commons sont créés et importés par les internautes. Mais le processus d’import de fichier est actuellement extrêmement complexe.
Tout d’abord, la nature multilingue de Commons rend difficile les discussions entre participants. La lingua franca est naturellement l’anglais, qui est utilisé par défaut à nombre d’emplacements. Le système de classification des fichiers de Commons repose ainsi sur des catégories disponibles uniquement en anglais. Les participants qui ne sont pas à l’aise avec l’anglais sont donc rebutés par son omniprésence sur Commons.
Ensuite, la plupart des nouveaux participants n’ont aucune idée de ce qu’est une licence (libre ou non) et sont découragés par la complexité de l’interface. Alors que la plupart des autres sites de partage de photos ou vidéos proposent une interface simple, claire et efficace, Commons assaille le participant de questions visant non seulement à établir le statut légal de son fichier, mais également ce qu’il représente, où il a été créé, sa place dans le système de classification, etc.
Il est vrai que la particularité de Commons (ne proposer que du contenu librement réutilisable) rend nécessaire certaines vérifications, mais il existe des moyens plus simples de les effectuer, sans effrayer l’utilisateur avec un formulaire aussi compliqué qu’une déclaration d’impôts (j’exagère à peine).
La communauté de participants de Commons est assez particulière, au sens où elle est majoritairement constituée de participants à d’autres projets Wikimedia (tels que Wikipedia), qui souvent ne viennent sur Commons que ponctuellement, pour importer ou chercher quelques fichiers; rares sont les contributeurs qui participent vraiment activement à Commons.
Le contenu de Commons a grossi à un rythme effréné, mais la communauté de participants n’a pas suivi et se trouve actuellement dépassée par l’afflux de contenu. Ce problème n’arrive généralement pas sur Wikipedia, où le contenu grossit au même rythme que la communauté qui le rédige.
Cette différence de rythme de croissance entre le contenu et la communauté est, selon moi, à l’origine d’une large part des problèmes que rencontrent actuellement les nouveaux participants pour partager leurs fichiers.
En effet, la seule façon pour la communauté de Commons de faire face à l’afflux de contenu est de faire en sorte que les fichiers qui ne sont pas acceptables sur Commons ne soient pas importés, et que chaque fichier acceptable et téléchargé soit parfait, de sorte que la maintenance ultérieure soit réduite aux minimum (idéalement, nulle).
Pour cela, le formulaire de téléchargement recense de très nombreux cas de figure, sans se concentrer sur les plus courants. Puis, si l’utilisateur parvient à importer le fichier, il est souvent agressé par des messages automatiques lui indiquant que des informations sont manquantes (par exemple, il n’a pas ajouté de catégories permettant de classifier son image).
En ce sens, Wikimedia Commons a perdu son côté wiki, c’est à dire un site où les erreurs ou omissions des uns sont corrigées au fur et à mesure par les autres.
Il est à espérer que les améliorations techniques qui vont être apportées par le projet Multimedia usability encourageront davantage de participants à s’impliquer dans la vie et la maintenance de Commons, et que cela entraînera également, à plus long terme, un changement de comportement des utilisateurs envers les nouveaux participants.